NATURALISME

1. Gén. Caractère essentiel qui est conforme à la dynamique et aux propriétés de l’univers réel.

2. Art. École littéraire (fin XIXe s. - début XXe s.) qui visait à dépeindre la réalité sous tous ses aspects, même les moins attirants, d’une manière objective, en utilisant la méthode dite expérimentale empruntée aux sciences de la nature. Syn. réalisme. VA D.

3. Art. Dans les Beaux-Arts, conception qui prône le respect intégral, la reproduction exacte de la Nature et qui s’oppose à toute interprétation, à tout artifice ajouté. Ant. idéalisme; symbolisme.

4. Éduc. Pratiques et théories de l’éducation inspirées des lois et des caractéristiques de la Nature. Le naturalisme de John LOCKE et de Jean-Jacques ROUSSEAU. VA A, D, E et F; approches didactiques en langues, D; paradigme symbiosynergique.

5. Épist./Phi. Doctrine qui considère la Nature comme le fondement premier de toute réalité. Ant. spiritualisme. VA A; positivisme, G; réalisme critique, D; paradigme symbiosynergique, B. TA rationalisme; scientisme.

6. Esth. Doctrine selon laquelle l’art a pour but de représenter la nature d’une façon réaliste et qui partant, condamne tout à la fois son idéalisation et son abstraction. VA D. TA réalisme.

7. Méd. Théorie médicale qui prétend que la Nature serait la principale, voire la seule, origine curative des maladies.

8. Mor. (Gén.). Doctrine selon laquelle la vie morale s’assimile ultimement à la vie biologique, de sorte que la nature la génère et fournit le principe de son explication. VA C.

9. Mor. (Spéc.). Doctrine selon laquelle les règles de la morale émanent de la nature même de l’être humain, puisque l’être humain fait partie de la Nature en tant qu’être libre et raisonnable.

10. Péd./Psych. Conception de l’individu, opposée à l’humanisme et à son intérêt pour les caractéristiques spécifiquement humaines, qui étudie l’être humain en tant que produit de la Nature sans accorder la préséance à certaines de ses facultés.

11. Phi. Doctrine ontologique moniste postulant que rien n’existe au-dehors de la Nature, entendue au sens d’univers physique ou matériel, et niant toute existence, influence ou transcendance surnaturelle. VA A.

12. Rel. Nom donné à la religion de la Nature telle qu’imaginée par Denis DIDEROT (1713-1784), laquelle nie l’existence d’un Dieu. VA A.

A. Immanence/transcendance. Le naturalisme en tant que philosophie rejette le recours à toute intervention divine, à tout surnaturel et à toute transcendance dans l’explication du fonctionnement du monde. Le naturalisme n’exclut pas qu’il puisse exister un principe organisateur dans le monde. Il prétend cependant que, s’il existe, ce principe sera immanent. Le naturalisme s’apparente ainsi à l’athéisme. Le naturalisme considère que la nature porte en elle, de manière immanente, les principes de son organisation et que, par conséquent, toute explication scientifique des phénomènes doit faire l’économie d’un principe surnaturel. VA paradigme symbiosynergique, A.

B. Système philosophique. Le naturalisme n’est pas un système philosophique précis. Il serait plutôt une sorte de perspective sur le monde dont on sent l’influence autant en épistémologie qu’en morale que dans certains systèmes d’organisation du monde.

C. Formes. L’appellation « naturalisme » s’applique en philosophie à toute morale qui emploie le concept de « Nature » comme un guide, une référence ou un fondement de la réalité. En général, on qualifie de « naturaliste » toute philosophie de l’acception de la contingence des choses ou toute morale qui prône la connaissance et la reconnaissance des passions et des instincts auxquels est soumis l’Homme. Ainsi, la théorie stoïcienne d’adhésion à tout événement serait naturaliste tout comme le serait la doctrine épicurienne du plaisir ou encore l’art de vivre de Michel Eyquem de MONTAIGNE (1533-1592). Ce dernier avait imaginé une morale qui prescrivait la soumission bien réglée au tempérament. Cette soumission est pour MONTAIGNE le principal gage du bonheur et de la vertu. Cette conception naturaliste est illustrée par deux de ses célèbres maximes : « Nature est un doux guide » et « Suivre nature ». La doctrine naturaliste est critiquable en ce qu’elle nie la distinction des jugements de fait et des jugements de valeur et leur irréductiblité. Elle pense que des premiers on peut tirer les seconds, à l’encontre de l’interdit formulé par David HUME (1711-1776) d’obtenir des ought de is. En ce sens, George Edward MOORE (1903) a pu baptiser sophisme naturaliste les tentatives de réduction du bien à des propriétés naturelles.

D. Peinture et littérature. Le terme a été appliqué à Gustave COURBET (1819-1877) et à sa peinture réaliste (SALON de 1857). Mais il évoque surtout la doctrine d’Émile ZOLA (1840-1902) qui assigne au roman le modèle idéal de l’objectivité, visant la reproduction fidèle du réel (Le roman expérimental, 1880).

E. Romantique/scientifique. Le concept de nature a reçu diverses acceptions allant du romantisme le plus mystique aux conceptions scientifiques les plus empiristes : la polysémie des conceptions naturalistes de l’éducation doit se comprendre à partir de cette variété d’acceptions du mot « nature ».

F. Éduc. Les pratiques et théories naturalistes de l’éducation reposent notamment sur la négation du surnaturel, la proscription des questions d’ordre religieux, la valorisation de l’appréhension du réel dans ses dimensions et manifestations concrètes voire, chez Jean-Jacques ROUSSEAU (1712-1778), sur un idéal d’éducation en conformité et en harmonie avec la Nature. VA D.

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